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Aube ou aurore ?

  • Cécilia Allain
  • 26 juin 2016
  • 5 min de lecture


L’été est enfin là, annonçant l’arrivée des beaux jours, des vacances et des longues journées de farniente sous la chaleur du soleil. Les vacanciers savoureront une glace sous le crépuscule du soir et les travailleurs se lèveront sous les premières lueurs du ciel.


Partiront-ils à l’aube ou à l’aurore ?


L’aube arrive avant l’aurore et se caractérise par une lumière blanche alors que l’aurore teint le ciel d’une lueur rosée et précède le lever du soleil.


Plus de place au doute mais ceci est relatif au français. Qu’en est-il en espagnol et en anglais ?


L’espagnol, tout comme le français fait également la distinction entre l'aube « alba » et l'aurore « aurora » :


  • Alba : Momento del día en el que la luz del sol, blanca, ilumina el cielo.

  • Aurora : Luz sonrosada que precede inmediatamente a la salida del sol.


Pas de problème de traduction alors !


Mais reste l’anglais…


L’anglais est moins précis et ne semble pas avoir de termes pour différencier l’aube de l’aurore. Les anglophones emploient tour à tour « dawn » et « daylight », deux mots qui qualifient les premières lueurs du jour.

Il n’y a pas non plus d’allusion aux couleurs, un critère fondamental en français comme en espagnol.

On retrouve certes le terme « aurora » mais il est surtout employé dans le domaine de la poésie.


Se pose alors la question de la traduction. Comment traduire la différence entre les termes « aube » et « aurore » en anglais ?

Si l'auteur ne porte pas l'accent sur la différence et emploie l'un et l'autre sans un ordre prédéfini, le traducteur pourra également procéder de même au moment de la traduction anglaise. Si le contexte requiert une nuance implicite en français, il faudra la rendre plus explicite en anglais avec, par exemple, la méthode de l'étoffement au moment de traduire.


Je vous laisse deux poèmes français de Victor Hugo et deux poèmes espagnols de Federico Garcia Lorca. Chacun est suivi d'une traduction anglaise qui démontre encore une fois, que la traduction est plus compliquée de ce qu'elle n'y paraît...



Demain, dès l'aube

Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne, Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m'attends. J'irai par la forêt, j'irai par la montagne. Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps. Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées, Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit, Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées, Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit. Je ne regarderai ni l'or du soir qui tombe, Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur, Et quand j'arriverai, je mettrai sur ta tombe Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur.

Victor Hugo, Les Contemplations, 1856.

Tomorrow, at dawn

Tomorrow, at dawn, at the hour when the countryside whitens, I will set out. You see, I know that you wait for me. I will go by the forest, I will go by the mountain. I can no longer remain far from you. I will walk with my eyes fixed on my thoughts, Seeing nothing of outdoors, hearing no noise Alone, unknown, my back curved, my hands crossed, Sorrowed, and the day for me will be as the night. I will not look at the gold of evening which falls, Nor the distant sails going down towards Harfleur, And when I arrive, I will place on your tomb A bouquet of green holly and of flowering heather.

Anonyme

L'aurore s'allume

L'aurore s'allume ; L'ombre épaisse fuit ; Le rêve et la brume Vont où va la nuit ; Paupières et roses S'ouvrent demi-closes ; Du réveil des choses On entend le bruit. Tout chante et murmure, Tout parle à la fois, Fumée et verdure, Les nids et les toits ; Le vent parle aux chênes, L'eau parle aux fontaines ; Toutes les haleines Deviennent des voix ! Tout reprend son âme, L'enfant son hochet, Le foyer sa flamme, Le luth son archet ; Folie ou démence, Dans le monde immense, Chacun recommence Ce qu'il ébauchait. Qu'on pense ou qu'on aime, Sans cesse agité, Vers un but suprême, Tout vole emporté ; L'esquif cherche un môle, L'abeille un vieux saule, La boussole un pôle, Moi la vérité !

Victor Hugo, Les Chants du Crépuscule, 1835

Morning

Morning glances hither,

Now the shade is past;

Dream and fog fly thither

Where Night goes at last;

Open eyes and roses

As the darkness closes;

And the sound that grows is

Nature walking fast.

Murmuring all and singing,

Hark! the news is stirred,

Roof and creepers clinging,

Smoke and nest of bird;

Winds to oak-trees bear it,

Streams and fountains hear it,

Every breath and spirit

As a voice is heard.

All takes up its story,

Child resumes his play,

Hearth its ruddy glory,

Lute its lifted lay.

Wild or out of senses,

Through the world immense is

Sound as each commences

Schemes of yesterday.

Traduction de W.M. Hardinge.

La aurora

La aurora de Nova York tiene

cuatro columnas de cieno

y un huracán de negras palomas

que chapotean las aguas podridas

La aurora de Nova York gime

por las inmensas escaleras

buscando entre las aristas

nardos de angustia dibujada.

La aurora llega y nadie la recibe en su boca

porque allí no hay mañana ni esperanza posible.

A veces las monedas en enjambres furiosos

taladran y devoran abandonados niños.

Los primeros que salen comprueban con sus huesos

que no habrá paraíso ni amores deshojados;

saben que van al cieno de números y leyes,

a los juegos sin arte, a sudores sin fruto.

La luz es sepultada por cadenas y ruidos

en impúdico reto de ciencia sin raíces.

por los barrios hay gentes que vacilan insomnes

como recién salidas de un naufragio de sangre.

Federico Garcia Lorca, Poeta en Nueva York, 1940.

Dawn

Dawn in New York has four columns of mire and a hurricane of black pigeons splashing in the putrid waters. Dawn in New York groans on enormous fire escapes searching between the angles for spikenards of drafted anguish. Dawn arrives and no one receives it in his mouth because morning and hope are impossible there: sometimes the furious swarming coins penetrate like drills and devour abandoned children. Those who go out early know in their bones there will be no paradise or loves that bloom and die: they know they will be mired in numbers and laws, in mindless games, in fruitless labors. The light is buried under chains and noises in the impudent challenge of rootless science. And crowds stagger sleeplessly through the boroughs as if they had just escaped a shipwreck of blood.

Traduction de Stephen Spender et J.L. Gili

Alba

Mi corazón oprimido siente junto a la alborada el dolor de sus amores y el sueño de las distancias.

La luz de la aurora lleva semilleros de nostalgias y la tristeza sin ojos de la médula del alma. La gran tumba de la noche su negro velo levanta para ocultar con el día la inmensa cumbre estrellada.

¿Qué haré yo sobre estos campos cogiendo nidos y ramas, rodeado de la aurora y llena de noche el alma? ¿Qué haré si tienes tus ojos muertos a las luces claras y no ha de sentir mi carne el calor de tus miradas?

¿Por qué te perdí por siempre en aquella tarde clara? Hoy mi pecho está reseco como una estrella apagada.

Federico Garcia Lorca, Libro de Poemas, 1921.

Dawn

My burdened heart

feels, alongside the aubade,

the pain of its loves

and the dream of faraway places.

The light of dawn brings

seedbeds of nostalgia

and the eyeless sorrow

of the soul’s marrow.

The great grave of night

lifts its black veil

to hide, by means of the day,

the immense starry summit.

What am I to do in these fields

collecting nests and branches,

surrounded by the dawn

while my soul is full of night?

What shall I do if your eyes are

dead to the bright light

and my flesh will not feel

the warmth of your glances?

Why did I lose you forever

on that bright afternoon?

Today my breast is parched

like an extinct star.

Traduction de Stanley Appelbaum



 
 
 

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